A Thiel, le 24 octobre, une bande de 20 voleurs est mise aux arrêts avec l’appui de la Gendarmerie. La bande conduite par O.D.K opérait nuitamment pour emporter des dizaines de moutons et de bovins. Les pertes pour les éleveurs sont estimées à 25 millions de F CFA pour les seuls dix premiers mois de l’année 2020. Un autre coup de filet avait permis le 16 septembre de mettre la main sur un grand voleur qui avait sous ses ordres une dizaine de jeunes pour opérer le jour comme la nuit.
A Bokhol, dans le département de Dagana et à Ourossogui (département de Matam) les comités de lutte ont aidé à mettre sous les verrous près neuf voleurs et receleurs. D’autres comités ont eu autant de réussite, mais ont préféré ne pas communiquer pour ne pas éveiller des soupçons. Certains sont d’avis que la lutte est plus efficace dans la discrétion, car en général les voleurs sont connus dans les terroirs au niveau desquels ils opèrent. Les arrestations sans publicité, pourraient donc éviter, selon eux, d’indexer des dénonciateurs et donc des représailles.
Le plus important donc, c’est l’implication des populations à travers la création de comités de veille, de prévention et de lutte contre le vol de bétail, particulièrement dans les zones transfrontalières. Pour documenter les expériences locales des différents comités, le Projet régional d’appui au pastoralisme au sahel (PRAPS) avait financé une étude visant à valoriser davantage les initiatives réussies et en faire des sources d’inspiration des politiques de lutte contre le vol de bétail. L’étude de capitalisation commanditée par le PRAPS, portait sur les causes du phénomène de vol de bétail, ses facteurs amplificateurs, ses conséquences et les bonnes pratiques entreprises à différents niveaux pour endiguer ce fléau et ses impacts.
Ce travail a été entrepris par le PRAPS dans le cadre de sa composante « gestion des crises pastorales. » Le projet s’est engagé dans un processus de capitalisation de ces bonnes pratiques dans une perspective de réplication sur tout le territoire national. Les meilleures pratiques ont été ainsi partagées, avant leur passage à l’échelle.
Quelle que soit la stratégie adoptée, la vérité, c’est que les comités de lutte et de veille sur le vol de bétail commencent à récolter les fruits de leur détermination. Pour rappel, le PRAPS s’est bien impliqué dans la prévention du vol de bétail par la constitution et la formation de 20 comités de lutte dans les huit départements couverts par le projet. Ces comités avaient reçu chacun des équipements constitués de sifflets, de botte et de torches à très longue portée.
Pour éviter les abus, les forces de sécurité et de défense ont contribué à cette formation. Elles ont surtout expliqué aux membres des comités les tenants et les aboutissants de leurs prérogatives et la nécessité de saisir les corps de l’Etat à certains niveaux d’intervention. Les arrestations opérées jusqu’ici ont confirmé que la collaboration entre les comités et la Gendarmerie, par exemple, semblent bien huilée.
LES DIX COMMANDEMENTS POUR ATTENUER LE VOL DE BETAIL
- Utiliser le téléphone portable pour partager rapidement les informations et les caractéristiques des animaux volés avec les autres comités de veille, les chefs de village, les collectivités locales et les forces de sécurité.
- Eviter d’utiliser immédiatement les radios communautaires et les médias de masse, car les voleurs et leurs complices font partie des auditeurs qui reçoivent les informations.
- Parcourir les abattoirs et les marchés hebdomadaires pour effectuer des contrôles systématiques sur tous les animaux destinés à l’abattage.
- Faire connaître et enregistrer les associations et comités de vigilance au niveau du ministère de l’Intérieur pour les rendre légaux et légitimes devant les acteurs y compris l’administration et les autorités religieuses.
- Déployer une large campagne de plaidoyer et de communication afin de juguler le vol de bétail et confondre les voleurs démasqués. Matérialiser la fluidité des relations entre les comités de veille, les autorités administratives, les services de l’élevage et les forces de sécurité par un partage permanent d’informations.
- Vulgariser les bonnes pratiques recensées en y associant les forces de sécurité et de défenses, les collectivités territoriales, les femmes, les jeunes, les chefs de village et les associations professionnelles du bétail et de la viande.
- Initier un pool d’avocats gracieusement mis à la disposition des comités de lutte contre le vol de bétail pour les assister, les défendre et les conseiller en cas de besoin.
- Vulgariser les procédures du code pénal et du code de procédures avec toutes les nouvelles modifications apportées et visant, entre autres, à criminaliser le vol de bétail.
- Impliquer les Organisations pastorales dans l’identification et l’assurance du cheptel. Généraliser la lutte contre les abattages clandestins et mettre en place un plan de reconversion et d’intégration des bouchers clandestins.
- Appliquer avec rigueur les contrôles sur les mouvements de bétail y compris la transhumance, en application de la réglementation sanitaire et l’identification des transhumants et de leurs animaux.