Malgré son potentiel bovin inestimable, la filière laitière sénégalaise cale sur la faible productivité des vaches locales, l’insuffisance et la faible valeur nutritive des pâturages naturels, les fortes variations saisonnières de la production, l’éloignement des sites de productions des zones de de grande consommation, le faible investissement de l’Etat dans les filières laitières locales, les difficultés d’accès au crédit, les coûts élevés de production, le manque d’organisation des éleveurs, la chaleur qui altère vite le lait, sans oublier l’impraticabilité des pistes de production, surtout pendant l’hivernage où les plus grandes quantités de lait sont produites.
A cela s’ajoutent l’utilisation généralisée du lait en poudre y compris par les éleveurs eux-mêmes, les coûts exorbitants des aliments de complémentation et des intrants, la mauvaise connaissance des effectifs et des performances zootechniques et l’absence de recensement de la population animale. Et pourtant, le Sénégal qui souffre de malnutrition protéique chronique, a tout à gagner dans la promotion de la filière laitière locale.
La production de lait cru a fait un bond important en passant de 185 millions de litres en 2011 à 232 millions en 2016. Cette tendance s’est améliorée de l’ordre de 3% en 2017 et 2018, en attendant l’évaluation de la campagne de collecte de lait en 2019. Cette production ne couvre cependant que 40% de la consommation nationale et revêt un caractère saisonnier très marqué.
C’est pourquoi, en vue de réduire une facture laitière de l’ordre de 60 milliards de FCFA par an, le Gouvernement a pris d’importantes mesures à travers l’insémination artificielle et l’importation de races bovines exotiques depuis 1965. Rien qu’en 2017, 1077 génisses gestantes ont été importées dans le cadre d’un partenariat entre l’Association nationale pour l’intensification de la production laitière (ANIPL) et le ministère de l’Elevage. Les génisses ont été subventionnées par l’Etat à hauteur de 44 % du coût total des importations. Pour rendre les produits laitiers locaux plus compétitifs, le lait pasteurisé élaboré à partir du lait cru a été exonéré de taxes.
Cette volonté politique se manifeste aussi à travers le Plan Sénégal Emergent (PSE) qui fait de l’autosuffisance en lait une question de sécurité et de souveraineté alimentaires. Ainsi le Projet d’appui au développement de la filière laitière (PRADELAIT), a été hissé au rang des projets prioritaires. Il est établi, en effet que des investissements appropriés dans l’élevage permettront, non seulement de contribuer à l’accélération de la croissance économique, mais aussi d’améliorer la sécurité alimentaire, les revenus des pasteurs et la résilience des communautés pastorales.
Pour renforcer le gouvernement dans son option d’atténuer l’hémorragie de devises, le PRAPS Sénégal s’est investi dans la réduction des importations de lait et produits laitiers à travers la construction de 11 infrastructures de transformation et de collecte de lait, la promotion de la culture et de la constitution de réserves fourragères, en réponse à l’insécurité alimentaire du bétail et le soutien à la commercialisation des produits laitiers d’origine animale.
C’est dans ce cadre que le projet a financé plusieurs formations sur la transformation du lait. Exemple : en partenariat avec l’Institut de technologie alimentaire (ITA), la Direction des Industries animales (DIA) du ministère de l’Elevage et des Productions animales (MEPA) a organisé du 19 au 30 août 2019, un atelier de formation des formateurs sur les techniques de transformation et de conservation du lait. La formation s’est déroulée au Centre de formation des métiers de l’alimentation de l’ITA, à Dakar. Elle a été financée par le PRAPS-SN. Quinze (15) personnes dont douze (12) femmes ont pris part à l’atelier. Une femme députée, dans la législature en cours, figurait parmi les participants. A terme, tous les participants sont appelés à partager leurs connaissances avec les structures représentées.
La technologie du lait est complexe et délicate. Le traitement et la transformation du lait ont pour but sa conservation entière ou celle de certains de ses constituants. Cette activité ne s’accompagne pas nécessairement de l’élimination des micro-organismes pathogènes présents dans le lait. Pour cette raison, les procédés de conservation sont souvent complétés par des procédés d’assainissement.
Ainsi, le PRAPS encourage les fermiers locaux et les entreprises pastorales à améliorer fortement leurs techniques de traite, de transport, de transformation et de conservation du lait. Grâce à une série de formations et de séances de sensibilisation les procédés artisanaux rudimentaires cèdent la place à plus d’ingéniosité, de savoir-faire et de savoir-être. Ces changements ont des conséquences heureuses sur la qualité des produits et les aspects socioéconomiques des entreprises pastorales.
Le ministère de l’Elevage s’est également tourné vers l’organisation et la professionnalisation de la filière lait. Dans le cadre de l’appui à la structuration des filières et la diffusion à grande échelle des résultats de la recherche dans le domaine de l’élevage, le processus de mise en place de l’interprofession laitière est déjà lancé. Quatre collèges constitués de Producteurs, de Collecteurs, de Transformateurs et de Distributeurs ont été installés dans chaque région et au niveau national. En définitive, ce sont les représentants de ces collèges qui vont former le Bureau national constitutif de l’Interprofession Lait. Le processus a été conduit par le Fonds national de développement agro-sylvo-pastoral (FNDASP) sur financement du PRAPS Sénégal.
Parallèlement, les opérations de constitution de réserves fourragères se poursuivent à travers la préservation des pâturages, la fauche du fourrage naturel et la valorisation des sous-produits agricoles. A cet effet, le PRAPS Sénégal a mis dix motofaucheuses équipées et autant de botteleuses à la disposition des pasteurs et agropasteurs. Les opérations de culture et de constitution de réserves fourragères sont régulièrement synchronisées avec la lutte contre les feux de brousse, la réalisation de pare-feu et les mises en défens en collaboration avec les Inspections régionales des Eaux et Forêts. Entre autres spéculations, le PRAPS travaille à vulgariser le néma ou maralfalfa. Le néma est une espèce prolixe très prisée par les animaux. Le projet appuie l’Association pour la défense des intérêts des producteurs de Podor (ADIPP), à travers la démultiplication de périmètres fourragers le long du fleuve Sénégal. En somme, le soutien du PRAPS aux pasteurs et agropasteurs vise à faire de l’élevage la mamelle nourricière du PSE et donc la rampe de lancement d’un décollage économique réussi.